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L'article 49.3 de la Constitution, activé aujourd'hui par le Premier ministre Michel Barnier, a été utilisé par de nombreux Premiers ministres par le passé, Michel Rocard en tête

L'article 49.3 de la Constitution, activé lundi par le Premier ministre Michel Barnier, a été utilisé par de nombreux Premiers ministres par le passé, Michel Rocard en tête, et plus de 100 fois sous la Vème République. Jean-Marc Ayrault (2012-2014) et François Fillon (2007-2012) n'y ont jamais eu recours.

De même, Lionel Jospin (1997-2002), durant la cohabitation avec Jacques Chirac, n'a pas fait appel à cette disposition qui permet de faire adopter sans vote un projet de loi, si aucune motion de censure n'est votée contre le gouvernement par l'Assemblée nationale.

Dans la plupart des cas où l'article 49.3 a été utilisé, l'opposition a déposé une motion de censure, à chaque fois rejetée.

Depuis la révision constitutionnelle de 2008, l'article 49.3 ne peut être utilisé que sur un projet de loi budgétaire et un seul autre type de texte durant la session parlementaire. Mais si le Conseil des ministres l'a autorisé, le Premier ministre peut l'utiliser à chaque lecture du même projet.

- Michel Rocard (mai 1988-mai 1991): 28 fois Faute de majorité absolue au Parlement, Michel Rocard engage à 28 reprises sa responsabilité via l'article 49.3 au début du second septennat de François Mitterrand. Quinze textes sont ainsi adoptés, notamment la loi créant le Conseil supérieur de l'audiovisuel, la réforme du statut de la Régie Renault et la loi de programmation militaire 1990-1993.

- Edith Cresson (mai 1991-avril 1992) : 8 fois Elle fait usage à huit reprises du 49.3, pour faire passer en force quatre projets de loi, dont le budget 1992 et la création de l'Agence du médicament.

- Pierre Bérégovoy (avril 1992-mars 1993): 3 fois Le dernier Premier ministre socialiste de François Mitterrand utilise trois fois l'article 49.3, sur la maîtrise des dépenses de santé, le budget 1993, le Fonds de solidarité vieillesse.

- Edouard Balladur (mars 1993-mai 1995): 1 fois Disposant d'une majorité écrasante à l'Assemblée, durant la seconde cohabitation entre la droite et François Mitterrand, il n'utilise le 49.3 qu'une fois, sur les privatisations d'entreprises publiques. - Alain Juppé (mai 1995-juin 1997): 2 fois Le Premier ministre de Jacques Chirac a recours à deux reprises au 49.3: fin 1995 pour le projet de loi l'autorisant à légiférer par ordonnances pour réformer la protection sociale, puis en 1996 sur le statut de France Télécom.

- Jean-Pierre Raffarin (mai 2002-mai 2005): 2 fois M. Raffarin se saisit en 2003 du 49.3 alors que la gauche et l'UDF ont déposé quelque 13.000 amendements sur sa réforme des modes de scrutin régional et européen.

En 2004, il l'utilise à nouveau pour le projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales qui favorise la décentralisation.

- Dominique de Villepin (mai 2005 - mai 2007): 1 fois En 2006, Dominique de Villepin utilise le 49.3 pour faire passer le projet de loi pour l'égalité des chances, qui inclut le très contesté Contrat première embauche (CPE). Le projet de loi sera adopté, mais la mobilisation massive de la rue aboutira à son abrogation.

- Manuel Valls (mars 2014 - décembre 2016) : 6 fois En 2015, il utilise le 49.3 à trois reprises pour faire passer le projet de loi d'Emmanuel Macron, alors ministre de l'Economie, "pour la croissance et l'activité", prévoyant notamment une extension controversée de l'ouverture des commerces le dimanche. En 2016, M. Valls utilise également le 49.3 trois fois pour l'adoption de la loi travail défendue par Myriam El Khomri, malgré une vive contestation sociale.

- Edouard Philippe (mai 2017 - juillet 2020): 1 fois En février 2020, Edouard Philippe dépose un 49.3 pour faire adopter sa très controversée réforme des retraites contre laquelle quelque 41.000 amendements ont été déposés. La réforme est adoptée de facto en première lecture, mais l'épidémie de Covid-19 la gèle ensuite.

- Elisabeth Borne (mai 2022 - janvier 2024): 23 fois En deux mois fin 2022, elle a recours dix fois au 49.3 et déjoue douze motions de censure de la Nupes, LFI ou le RN, afin de faire passer sans vote les budgets 2023 de l'Etat et de la Sécurité sociale. Une telle cadence n'était plus arrivée depuis 1989, quand Michel Rocard était lui aussi privé de majorité absolue. Le 16 mars 2023, Mme Borne et Emmanuel Macron décident d'actionner le 49.3 une onzième fois pour faire passer sa très controversée réforme des retraites qui repousse l'âge légal de départ de 62 à 64 ans.

Elle fait échec le 20 à deux motions de censure. Le 27 septembre, Mme Borne dégaine son 12ème 49.3 sur le projet de programmation des finances publiques 2023-2027. Le gouvernement a ensuite recours à dix reprises à l'arme constitutionnelle du 49.3 pour faire passer sans vote le budget de l'État et celui de la Sécurité sociale adopté en décembre 2023.

Jusqu'à son départ en janvier 2024, Mme Borne aura au total actionné 23 fois ce dispositif, sur six textes, et affronté une trentaine de motions de censure.

- Michel Barnier (décembre 2024): 1ère fois - Michel Barnier a engagé lundi la responsabilité du gouvernement sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale par l'article 49.3, activant pour la première fois cet outil depuis sa nomination en septembre. Les députés de La France insoumise ont aussitôt annoncé déposer une motion de censure. Le groupe Rassemblement national a annoncé qu'il déposera sa propre motion et votera celle de la gauche.

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Vos réactions

Portrait de John- Doe
2/décembre/2024 - 20h37

au risque de heurter certaines sensibilités, le 49.3 n a rien d'anti démocratique

Portrait de COLIN33
2/décembre/2024 - 18h33 - depuis l'application mobile

Le passé correspond au passé ! nous sommes en 2024 avec une bande de bras cassés qui se voient tous a l'Elysée, rien à faire de la situation de la France ....

Portrait de Archimedes
2/décembre/2024 - 18h22

C'était déjà scandaleux à l'époque, et rien n'a été fait pour empêcher ces méthodes anti-démocratiques.