
Par Juliette VILROBE
L'éditeur de presse et homme politique Nicolas Miguet a été déclaré coupable de manipulation de cours et condamné à deux ans d'emprisonnement dont un an et demi ferme, à exécuter sous bracelet électronique. Le tribunal correctionnel de Paris l'a jugé coupable de manipulation du cours de l'action de sa propre société Nicolas Miguet et Associés (NMA) en 2018. La société Quotidien de Paris Editions (QPE), l'Association des actionnaires révoltés (Arare) et l'association Rassemblement des contribuables français (RCF), entités liées à M. Miguet, ont été reconnues coupables du même chef et condamnées à des amendes d'un montant total de 1,3 million d'euros, dont plus de 500.000 euros avec sursis. La justice a estimé que les ordres passés par Nicolas Miguet, pour le compte de ces trois organisations, pour acheter ou vendre des actions NMA avaient eu pour effet de maintenir artificiellement son cours. Sa valeur était passée de 0,78 euro à 4,5 euros, entre avril et juillet 2018. Les éléments de l'enquête ont montré qu'à maintes reprises entre avril et juillet 2018, Nicolas Miguet avait demandé à son intermédiaire en investissements, la société Claresco Bourse, de programmer des ordres qu'il a qualifiés lui-même d'"épuisettes": des ordres d'achat quelques centimes en dessous du cours de clôture, afin de capter toute éventuelle vente de titres. Lors de son procès en octobre, Nicolas Miguet avait affirmé qu'il ne s'agissait que d'"éviter des déséquilibres" dans l'évolution du cours et n'avoir "commis aucune manipulation de cours".
Le tribunal a également retenu que les informations diffusées dans les titres de presse et les audiotels de Nicolas Miguet avaient contribué à la manipulation de cours. Contrairement à ce qu'avait défendu l'avocat du prévenu, "l'intentionnalité est caractérisée" selon la présidente du tribunal. Une peine d'inéligibilité de cinq ans a également été prononcée contre l'homme politique qui a tenté de se présenter aux cinq dernières élections présidentielles, sans réussir à recueillir les 500 parrainages d'élus nécessaires. Dans son réquisitoire, le procureur financier avait souligné la "gravité des faits" et les "18 condamnations" qui figurent au casier judiciaire de M. Miguet et qui "n'ont jamais empêché le renouvellement des faits, ni provoqué la moindre prise de conscience". Il avait demandé un mandat de dépôt, soit l'incarcération immédiate du prévenu.
M. Miguet est par ailleurs soumis à l'obligation de "payer le Trésor public", à qui il doit 1,3 million d'euros pour des amendes impayées infligées par le gendarme boursier, et de "justifier qu'il répare les dommages causés par l'infraction". L'Autorité des marchés financiers (AMF), à l'origine de l'enquête, s'était portée partie civile, une demande jugée recevable par le tribunal, qui demande à Nicolas Miguet et ses trois entités de "payer solidairement 6.230 euros en réparation du préjudice matériel et un euro symbolique en raison du préjudice subi par les épargnants". Nicolas Miguet n'était pas présent lors du rendu de la décision, "souffrant" selon son avocat Marc Goudarzian. Me Goudarzian a indiqué son intention de faire appel. Son client est "soulagé qu'il n'y ait pas de mandat de dépôt", a-t-il déclaré à l'AFP. Dans la même affaire, trois cadres de Claresco Bourse ont été jugés dans le cadre d'une procédure de plaider-coupable en septembre, et condamnés à des amendes et des peines de prison avec sursis. Les condamnations à des peines d'emprisonnement sont "extrêmement rares pour des délits d'initiés", a souligné auprès de l'AFP, Claire Sauty de Chalon, avocate associée du cabinet MirieuSauty, en amont de l'annonce de la décision. En mai dernier, le tribunal correctionnel de Paris avait condamné un financier à deux ans d'emprisonnement et une amende de 2,66 millions d'euros pour manipulation de cours.
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