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La désinformation anti-migrants au coeur de la campagne présidentielle en Pologne dont le premier tour du scrutin aura lieu le 18 mai prochain

Par Maja CZARNECKA

L'Allemagne qui refoule ses migrants noirs et musulmans par milliers vers la Pologne? Des réfugiés ukrainiens prêts à tout pour cumuler les allocations? Autant de fausses informations qui jouent sur la peur de l'étranger et circulent en masse en Pologne à l'approche de l'élection présidentielle.

Dans la dernière ligne droite avant le premier tour du scrutin, le 18 mai, les candidats de droite et d'extrême-droite s'en prennent à la politique migratoire du gouvernement pro-européen de Donald Tusk, l'accusant de laisser l'Allemagne submerger la Pologne de migrants. Le candidat du parti nationaliste Droit et Justice (PiS) Karol Nawrocki et celui de la formation d'extrême-droite libertarienne Confédération, Slawomir Mentzen, sont devancés dans les sondages par le maire pro-européen de Varsovie, Rafal Trzaskowski. Mais ils peuvent compter sur les réseaux sociaux, caisse de résonance de fausses informations visant les étrangers. Ici, des prières de rue "à Varsovie", en fait filmées en Italie.

Là, un groupe de jeunes migrants dans un village polonais à "Pâques 2025" - une photo vieille, en réalité, de plusieurs mois. Une vidéo partagée des milliers de fois en début d'année, y compris par des élus du PiS et de Confédération, était censée illustrer la reconduite d'un migrant à la frontière polonaise par la police allemande. L'homme était en fait un sans-abri polonais.

La désinformation anti-migrants prospère depuis des années en Pologne, terre d'accueil de très nombreux réfugiés ukrainiens et en proie à une pression migratoire. Mais "la nouveauté est qu'elle est conjuguée désormais avec le narratif anti-allemand, qui se nourrit de phobies anti-allemandes et anti-européennes", explique Anna Mierzynska, spécialiste indépendante des réseaux sociaux. Les deux phénomènes convergent quand Karol Nawrocki accuse le gouvernement de Donald Tusk d'avoir "abdiqué" face à l'Allemagne sur la question migratoire ou que Slawomir Mentzen appelle la police polonaise à "arrêter les policiers allemands" qui déposent des "migrants illégaux" sur le sol polonais.

Les experts en flux migratoires décrivent une réalité bien plus nuancée. "Nous n'observons pas de hausse particulière du nombre de migrants entrant en Pologne. Ni venus par la frontière Est, ni celle de l'Ouest", déclare à l'AFP Marta Kindler, chercheuse et professeur adjoint au Centre d'études sur les migrations de l'Université de Varsovie. "La politique migratoire du gouvernement Tusk est, à certains égards, plus restrictive que celle de ses prédécesseurs du PiS", ajoute-t-elle, rappelant que la Pologne a pris fin mars une disposition limitant le droit d'asile à l'arrivée à sa frontière avec le Bélarus.

Elle note qu'actuellement, "on voit arriver en Pologne principalement des ressortissants asiatiques, tels que des Philippins, des Indiens et des Népalais et des ressortissants sud-américains, notamment des Colombiens, et moins de migrants en provenance d'Afrique".

Un chiffre circule beaucoup, celui de 10.000 migrants - sous-entendu originaires du Moyen-Orient et d'Afrique - renvoyés par l'Allemagne. Il s'agit en fait des refus d'entrée en Allemagne en 2024, pour 60% des Ukrainiens, faute notamment de passeports valides, a récemment expliqué le ministère de l'Intérieur polonais. "C'est de la manipulation des chiffres à des fins politiques", déplore Monika Szulecka, chercheuse au même Centre d'études.

Les réfugiés ukrainiens sont aussi largement visés par la désinformation en ligne. Ainsi cette vidéo à l'audio trafiqué, censée montrer une "Ukrainienne ingrate" insatisfaite des colis alimentaires reçus en Pologne. Ou cette autre vidéo devenue virale, qui prétend montrer une réfugiée collectionnant les passeports pour cumuler les allocations - à l'origine un clip satirique, selon le site polonais Konkret24. Ces publications font écho aux éléments de langage poussés par Confédération qui s'en prend régulièrement au million d'"Ukrainiens ingrats" vivant en Pologne.

Pour Lukasz Olejnik, analyste et chercheur au département d'études sur la guerre du King's College de Londres, "les effets continus de la guerre [en Ukraine] et de la crise migratoire de 2021 sont toujours présents et entretiennent le sentiment de peur". Ces fausses informations viennent aussi nourrir des manifestations anti-migration, dont la prochaine est prévue le 10 mai à Varsovie.

"Dans cette campagne, l'objectif est d'éveiller des peurs", souligne aussi Katarzyna Bakowicz, professeure à l'École supérieure SWPS de Varsovie et coordinatrice de CEDMO, un observatoire anti-désinformation auquel participe l'AFP. "La désinformation est simplement un outil pour y parvenir".

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Vos réactions

Portrait de Bob28
10/mai/2025 - 08h43

"Ils disent qu'il y a des migrants en montrant une photo, alors qu'en vrai la photo a été prise 1 mois plus tôt, c'est bien la preuve qu'ils mentent"

Il faut vraiment avoir un cerveau malade...

Portrait de Danton-Fillon
9/mai/2025 - 14h42

Les migrants, les termites, les parasites ... Pourquoi ne demandent-ils pas à Dieu de les aider ? Pourquoi venir sur un continent de kouffars plutôt que dans des pays riches comme le Qatar ou les Émirats ? La maladie est incurable et on la répand sur l’Europe en nous faisant croire que c'est le remède ! Merci à LFI, complice de crime contre la patrie, collabos et manipulateurs.

Portrait de onluidira
9/mai/2025 - 14h04

Pourquoi parler de désinformation, alors que tout le monde sait et VOIT le résultat de l'invasion massive de l'immigration afro-islamiste sur nos sols européens ??? 

Portrait de soly
9/mai/2025 - 12h48

On se fout pas mal des détails, la réalité c'est que l'Europe entière est envahie par l'immigration de masse, et ça c'est un constat au quotidien. La seule solution est un éclatement de l'UE, et ne plus rien à voir avec l'ordure qu'est Ven der Layen. 

Portrait de soly
9/mai/2025 - 12h46