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Un juge d'instruction a repris début mai les investigations sur les accusations de "tabassages" portées par un journaliste infiltré deux ans dans la police parisienne à l'encontre de fonctionnaires du XIXe arrondissement, a indiqué lundi le parquet de Paris, sollicité par l'AFP. L'information judiciaire, qui prend la suite de l'enquête préliminaire lancée en septembre, est ouverte depuis le 5 mai pour "violences par personne dépositaire de l'autorité publique", "faux et usage de faux en écriture publique".
Violences, insultes racistes et homophobes mais aussi manque de moyens, suicide et mal-être des troupes : dans le livre "Flic" (éd. Goutte d'or), paru début septembre, le journaliste Valentin Gendrot raconte son infiltration mouvementée.
Officiant dans le commissariat du XIXe arrondissement de Paris entre mars et août 2019, il explique avoir assisté à plusieurs "tabassages" et témoigne de pratiques "racistes" de la part de certains policiers.
Passage le plus explosif, Valentin Gendrot raconte une "bavure" commise par un collègue, des "coups de poings" sur un adolescent, qu'il avait lui-même couverte avec d'autres policiers, ce qui lui avait valu des critiques. Le jeune homme, dont la gravité des blessures n'est pas détaillée, avait été visé par une plainte pour "outrage" et "menace" du policier accusé des coups. L'adolescent avait également porté plainte pour "violences".
M. Gendrot assure ensuite qu'un PV "mensonger" avait été rédigé pour "charger le gamin et absoudre" le policier, et qu'il avait incriminé lui aussi l'adolescent lors d'une enquête interne. Il avait justifié à l'AFP sa décision "extrêmement compliquée" par son souhait de "dénoncer mille autres bavures de ce type".
Le livre évoque aussi nombre de ferments de la grogne au long cours des personnels: politique du chiffre, voitures et locaux hors d'âge, suicide d'un collègue et hostilité de la population, salaire de 1.340 EUR mensuels net à Paris.
La préfecture de police avait signalé début septembre au procureur de Paris les faits relatés dans ce gros succès de librairie, afin d'établir leur véracité. M. Gendrot avait été entendu comme témoin le 1er octobre par l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), la police des polices, chargée des investigations. Il avait indiqué avoir appris de l'IGPN son intention d'auditionner huit policiers.
"Je me réjouis de cette nouvelle qui valide le sérieux de mon travail", a-t-il dit lundi à l'AFP, évoquant des "faits graves". Le juge d'instruction devra se prononcer sur la question du statut du journaliste dans cette procédure : "lanceur d'alerte" ? Complice ou coauteur des infractions ? "Sans lanceur d'alerte, nos institutions restent très timorées face à ces situations", a indiqué son avocat, Me Romain Boulet, se "félicitant" de ce développement.
"Par ailleurs, je m'inquiète de ce que M. Gendrot ne soit pas entendu, ne serait-ce que comme témoin assisté, (...) et qu'il soit ainsi délibérément tenu à l'écart d'une procédure dont il est pourtant le seul initiateur", a ajouté le conseil.
Depuis la publication du livre de M. Gendrot, les fonctionnaires de ce commissariat parisien ont fait l'objet d'autres accusations de violences.
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