13/04/2019 07:15

Les telenovelas font une percée en France grâce à une modernisation et des scénarios qui n'hésitent plus à s'attaquer à des sujets de société

Longtemps boudées par les chaînes du PAF, les telenovelas commencent à séduire les téléspectateurs hexagonaux, grâce à une montée en qualité et à des scénarios qui n'hésitent plus à s'attaquer à des sujets de société, comme les mariages forcés, le viol ou l'immigration.

Très populaires en Martinique et en Guadeloupe, où les chaînes publiques et privées font leur beurre des télénovelas produites en Amérique du Sud, notamment en Colombie ou au Brésil, ces feuilletons faisant la part belle à l'amour, la trahison et la vengeance, et qui ciblent un public féminin, étaient délaissées sur le petit écran en Métropole. Les aficionados devaient se rabattre sur la plateforme en ligne de M6, 6Play, qui en propose depuis plusieurs années.

Mais l'arrivée en France fin 2017 de la chaîne payante Novelas TV, créée par le groupe Canal+ et qui cartonnait déjà en Afrique francophone depuis 2015, a réveillé la flamme qui sommeillait dans le coeur des téléspectatrices : la chaîne, qui diffuse quatre telenovelas par jour, dont deux épisodes inédits, a réalisé une percée d'audience assez inattendue.

D'après la dernière enquête de Médiamétrie sur les chaînes thématiques, publiée en mars, sa part d'audience (pda) a plus que doublé en un an, pour atteindre 1,2% chez les mères de famille abonnées à une offre de Canal+. Et sur sa tranche phare, entre 16H et 19H, durant laquelle elle diffuse des épisodes inédits, elle est la 4e chaîne la plus regardée par ces téléspectatrices, derrière TF1, M6 et France 2, avec 4,8% de pda. Pour la directrice de Novelas TV Clémentine Tugendhat, cet engouement est lié à une "montée en gamme des telenovelas" et à leur côté très "addictif".

"Elles ont souffert en France d'une image désuète pendant des années, de séries tournées dans un seul décor, sans scène en extérieur, et un scénario répétitif à base de "je t'aime moi non plus" ", a-t-elle raconté lors d'une conférence de presse jeudi. Mais "elles sont devenues un genre majeur, aux Etats-Unis, en Amérique latine et en Turquie, avec 2 milliards de téléspacteurs dans le monde, et désormais elles sont produites par de très grands groupes comme Telemundo (filiale hispanophone de NBCUniversal), le groupe mexicain Televisa, le Brésilien Globo ou les Turcs de Kanal D et Ay Yapim", dit-elle. Ces sociétés disposent de moyens importants (150.000 dollars par épisode aux Etats-Unis ou en Amérique du sud, voire beaucoup plus en Turquie) et font appel à des superstars locales, souligne-t-elle.

Cet engouement du public Français n'a pas échappé au groupe TF1, qui diffusera à partir de lundi sur TF1 Séries Films "La vengeance de Veronica", deux fois par jour. Les épisodes de cette telenovela portugaise seront en outre rediffusés le lendemain matin sur TF1, à 10H00, entre le soap américain "Les feux de l'amour" et une rediffusion du feuilleton à la Française du groupe, "Demain nous appartient". "C'est une forme de test" et "c'est un genre qui nous intéresse", a expliqué à l'AFP Xavier Gandon, directeur des antennes du groupe TF1.

"On voit qu'il y a un essor des feuilletons, des soaps et des novelas", dit-il, des rendez-vous qui permettent "de fidéliser les téléspectateurs, qui sont pris dans l'intrigue, s'attachent aux personnages et veulent savoir ce qu'il va leur arriver". Le responsable ajoute que le groupe a acquis d'autres telenovelas, sans en dire plus pour le moment sur la façon dont elles seront diffusées. De son côté, Novelas TV va passer à trois épisodes inédits par jour en mai, projette un magazine hebdomadaire sur les stars des telenovelas, et n'exclut pas de se lancer dans une coproduction avec un groupe turc.

Autre tendance soulignée par la chaîne, les thèmes des telenovelas se sont renouvelés : si elles sont toujours construites autour d'histoires d'amour et de trahison, elles n'hésitent plus à traiter de sujets graves et à surfer sur l'actualité. Novelas TV s'apprête ainsi à lancer le 18 avril une nouvelle série de Telemundo inédite en France, "De l'autre côté du mur", qui raconte l'installation aux Etats-Unis de deux femmes, dont l'une est victime de violences conjugales, et qui a pour toile de fonds les tensions politiques autour de la frontière USA/Mexique. Et elle a diffusé l'an dernier le feuilleton turc "Fatmagül", qui raconte le drame d'une femme violée et contrainte à un mariage forcé.

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