
Avec 42.000 créations d'emploi nettes au premier trimestre, le marché du travail se porte toujours bien mais de premiers signes, dans la construction notamment, laissent penser que la suite de l'année sera plus difficile. Selon l'estimation provisoire publiée par l'Insee, l'emploi salarié dans le privé a progressé de 0,2% au premier trimestre, comme au dernier trimestre 2022. "Il s'agit du neuvième trimestre consécutif de hausse", souligne l'Insee.
L'emploi excède son niveau d'un an auparavant de 1,3% (soit +271.100 emplois) et celui d'avant la crise sanitaire (fin 2019) de 5,8% (soit +1,2 million d'emplois). En dépit d'une "croissance molle" (+0,2% au premier trimestre), "il y a une résistance encore assez forte de l'emploi ce trimestre", constate Mathieu Plane, directeur adjoint du département analyse et prévision de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). "Ce n'est pas une surprise car les intentions d'embauches restent assez bonnes à court terme dans les enquêtes", rappelle-t-il.
L'Urssaf a ainsi enregistré plus de 2,4 millions de déclarations d'embauche de plus d'un mois (hors intérim) au premier trimestre, supérieur de 12,9% au niveau enregistré fin 2019. "Une augmentation de 0,2% de l'emploi salarié privé, c'est un peu mieux que prévu", reconnait Yves Jauneau, chef de la division synthèse et conjoncture du marché du travail de l'Insee. Dans sa dernière note de conjoncture, l'institut ne prévoyait que 19.000 créations nettes, soit une hausse de 0,1%.
Toutefois, ces augmentations "sont de plus en plus modérées: +1,1% en moyenne chaque trimestre en 2021; +0,5% sur les trois premiers trimestres 2022; +0,2% sur les deux derniers trimestres", note M. Jauneau. Et les évolutions sectorielles sont contrastées.
D'un côté, le tertiaire marchand retrouve sa fonction de locomotive de l'emploi: +0,5%, soit +57.400 emplois, après +0,1%. Il dépasse ainsi son niveau d'un an auparavant de 1,9% (soit +232.700 emplois) et celui d'avant-crise de 7,2% (soit +831.200 emplois). Mais, dans la construction (hors intérim), l'emploi baisse de 0,2% (soit -3.200 emplois). "Il s'agit du premier trimestre de baisse dans ce secteur depuis le quatrième trimestre 2016", souligne l'Insee.
"Le BTP avait beaucoup recruté ces dernières années. On voit les premières conséquences d'une diminution des mises en chantier de logements du fait de l'impact de la remontée des taux d'intérêt sur le pouvoir d'achat des ménages", explique M. Plane. Mi-avril, la Fédération française du bâtiment avait alerté sur la possible suppression de "près de 100.000 postes", soit peu ou prou le nombre d'emplois créés depuis la sortie du premier confinement de 2020.
Autre secteur en recul, l'intérim: -2,6% (soit 21.400 emplois). Un recul qui compense intégralement la hausse des deux trimestres précédents. "On est revenu à un niveau normal de 800.000 intérimaires. Depuis un an, il y a des fluctuations trimestrielles autour de ce niveau", relativise M. Jauneau qui juge "prématuré de tirer des conclusions quant à un retournement de l'emploi".
Néanmoins, pour M. Plane, ces chiffres de l'emploi au premier trimestre sont "peut-être le chant du cygne" de la bonne tenue du marché du travail qui ne cesse de surprendre les économistes trimestre après trimestre. Dans ses dernières prévisions mi-avril, l'OFCE s'attend ainsi "à une baisse de l'emploi marchand à partir du milieu d'année" sous l'effet d'une faible croissance, d'une baisse du nombre d'apprentis - due à la réduction de la prime à l'embauche pour un majeur de 8.000 à 6.000 euros en 2023 - et d'une "hausse de la durée du travail moyenne par salarié". Celle-ci avait diminué du fait du Covid - mise en activité partielle, arrêts maladie... - et n'a toujours pas retrouvé son niveau d'avant crise, selon l'institut.
En outre, avec la fin des aides publiques post-Covid, les défaillances d'entreprises ont retrouvé au premier trimestre leur niveau d'avant-crise, selon le cabinet spécialisé Altares. En conséquence, l'OFCE s'attend à une remontée du taux de chômage, qui était de 7,2% fin 2002, à partir du second semestre. Au premier trimestre, ce taux, qui dépend aussi de l'évolution de la population active, pourrait cependant encore "légèrement diminuer", concède M. Plane. Le chiffre sera connu le 17 mai.
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