28/12/2010 13:00

Les parents des otages s'en prennent au Gouvernement

"Je voudrais bien que mon fils revienne! Alors on a décidé de parler": Arlette Taponier, la mère de Stéphane, journaliste retenu en otage en Afghanistan depuis bientôt un an avec son confrère Hervé Ghesquière, sort du silence avec son mari, pour faire pression.

Dans une interview exclusive à l'AFP, Gérard et Arlette Taponier soulignent aussi qu'ils sont las de voir les déclarations d'optimisme du gouvernement ne pas êtres suivies d'effet.

Q: La semaine passée, le Quai d'Orsay a annoncé avoir reçu une nouvelle vidéo avec votre fils. Vous l'avez déjà visionnée?

Arlette Taponier: "Non, pas encore. Mais c'est nous qui n'avons pas voulu la voir. D'abord parce que je ne pense pas qu'il y ait grand chose. Ensuite parce que notre venue à Paris ces jours-ci était déjà programmée. On me l'a juste fait écouter au téléphone, mais je n'ai pas compris grand chose, le son était très mauvais. J'ai juste entendu que Stéphane avait sa voix des mauvais jours".

Gérard Taponier: "Personne parmi les proches n'a encore vu cette vidéo. On nous a juste dit qu'ils étaient très amaigris. On doit la voir mardi au Quai d'Orsay".

Q: Vous disposez d'informations sur les négociations?

G.T.: "C'est très dur d'en avoir. Lorsque Bernard Kouchner (ex-ministre des Affaires étrangères) était allé à Kaboul, il ne nous avait même pas téléphoné au retour. On n'a rien su, c'est un peu aberrant. Alain Juppé (ministre de la Défense depuis la mi-novembre) a l'air d'être plus consciencieux".

Q: Vous ne savez vraiment rien?

G.T.: "Rien du tout. C'est la DGSE qui s'occupe de ça: c'est +motus et bouche cousue+. Et quand on est reçu au Quai d'Orsay, c'est très vague. On dirait que nous sommes des numéros: pour eux, c'est une chose normale. Il y a une grande table, il y a quatre personnes devant nous... Mais nous, on n'a pas l'habitude".

Q: Rien non plus sur leurs conditions de détention?

G.T.: "Depuis le début, ils disent qu'ils sont vivants et en bonne santé. Pour le reste, on ne sait pas, tout est secret défense".

Q: Vous aimeriez en savoir plus?

G.T.: "S'ils nous disent de choses concrètes, volontiers. Mais si c'est pour nous dire qu'ils sont en bonne santé, ce n'est pas la peine..."

Q: Fin septembre, le chef d'état-major des armées Edouard Guillaud avait évoqué un "espoir raisonnable" d'une libération avant Noël. La semaine passée, la ministre des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie a parlé d'une libération "dans de très brefs délais". Ces propos rassurants n'ont pas encore été suivis d'effet.

G.T. "On est un peu blasés. Et agacés aussi par toutes ces déclarations. On nous a tellement raconté d'histoires jusqu'à maintenant... M. Juppé (qui revient d'une visite en Afghanistan, NDLR) a dit qu'il était confiant, mais sans donner de dates. Il est optimiste, mais cela fait presque un an qu'ils sont otages".

Q: Qu'est-ce qui est le plus dur dans cette situation?

A.T.: "C'est l'attente. On espérait une libération en septembre, puis à Noël... C'est toujours reporté. Je préfèrerais qu'ils ne disent rien".

G.T.: "Les ministres s'avancent un peu trop. Quand Alliot-Marie parle de +brefs délais+, on se dit que c'est imminent; et puis Noël est déjà passé... On espère toujours une bonne nouvelle, mais ça fout le cafard".

Q: Vous avez l'impression que le maximum a été fait depuis le début?

G.T.: "Non. C'est parti doucement, doucement... Il a fallu quatre-cinq mois pour que cela commence à bouger".

Q: C'est votre première interview?

A.T.: "Ca fait un an, je voudrais bien que mon fils revienne! Alors on a décidé de parler".

Q: Vous mettez ainsi la pression sur les gouvernements français et afghan?

A.T.: "Je l'espère. C'est pour Stéphane et Hervé..."

G.T.: "... et leurs trois accompagnateurs. Il ne faut pas les oublier. Le jour où ils seront libérés, que vont-ils devenir? Mais Nicolas Sarkozy nous a dit qu'ils pourraient obtenir l'asile en France".

Q: Vous lisez beaucoup les journaux?

A.T.: "Je suis obsédée par tout ce qui est écrit, j'achète tout, et je regarde tous les journaux télévisés. Mais c'est pénible en fin de compte, car cela me ressasse tout le temps la même chose".

Q: Les déclarations polémiques du début, lorsqu'on a reproché aux journalistes leur imprudence et dénoncé les coûts de leur recherche, vous ont blessés?

G.T.: "Il y a eu le (secrétaire général de l'Elysée) Claude Guéant, le général Jean-Louis Georgelin. Ce n'était pas très intelligent de leur part. Ca nous a fichu un sacré coup".

A.T.: "Mais, il ne faut plus en parler maintenant. C'est fini".

Q: Les nombreuses manifestations de soutien dans toute la France vous font tout de même chaud au coeur?

G.T.: "Ca fait du bien, d'autant qu'il y a Florence Aubenas (marraine du Comité de soutien), une personne très sympathique, qui est passée par là et nous aide énormément. Chez nous, toutes les mairies alentour à notre petit village (Reillanne, Alpes-de-Haute-Provence) ont affiché le panneau (de soutien). Ils ont marché à fond tout de suite, sans qu'on leur demande".

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Vos réactions

Portrait de miss nemo
28/décembre/2010 - 23h06

Il semblait que ces 2 journalistes pensaient avoir pris toutes les précautions y inclus en s'entourant de 3 accompagnateurs irakiens, hélas ...

Alors que faut-il faire à l'avenir, interdire à tous les journalistes français de s'y rendre et que les Français s'en remettent aux seules infos émanant du gouvernement en espérant qu'il n'y en aura pas trop qui relèveront du fameux "secret défense" et donc à ne pas divulguer aux simples citoyens que nous sommes ? Mouais, une méthode qui se pratique déjà dans certains pays, pas forcément démocratiques d'ailleurs.

Certains estiment que ces journalistes et leurs familles ne sont que victimes de leur irresponsabilité et doivent donc se débrouiller seuls en premier lieu parce que ça coûterait cher. Il n'y a peut-être plus qu'à prévoir que ce point de vue ne s'étendent à certains malades victimes du cancer du poumon par exemple, qu'ils se débrouillent seuls avec leur maladie, après tout chacun sait que le tabac est dangereux. Et ce n'est qu'un exemple, parce qu'après tout skier n'est pas sans risque, chacun le sait, alors si un adepte du ski se casse une jambe il pourrait peut-être être tenu pour responsable. L'avenir appartiendrait donc aux Français sans faiblesse, sans défaut, irréprochables et tellement responsables !