18/04/2020 11:02

Coronavirus - Cuba au bord du gouffre : Les restaurants et cafés fermé, le secteur privé en détresse depuis que l'île a fermé ses portes

Dans ce pays socialiste où l'Etat et ses entreprises dominent l'activité économique, le secteur privé s'est peu à peu fait une place ces dernières années: il emploie aujourd'hui 634.891 personnes, 14,5% des travailleurs cubains. Ces "cuentapropistas" (employés à leur compte) louent des chambres, tiennent des restaurants, des salons de coiffure... "Beaucoup de ces commerces privés se sont montés en comptant sur les touristes, car ce n'est vraiment pas un Cubain qui va aller à un paladar dépenser 100 dollars dans un repas", souligne l'économiste Omar Everleny Pérez. Ils ont donc vite senti le danger: deux jours après la fermeture des frontières aux non-résidents (mesure étendue ensuite à toute entrée sur le territoire), 16.062 travailleurs privés demandaient la suspension de leur licence, selon le ministère du Travail, qui les a exempté temporairement d'impôts. Mercredi, ils étaient 119.079 à l'avoir fait, soit 19% du total.

Cette crise sanitaire est la pire des nouvelles, car elle s'ajoute à deux mauvaises années pour les entrepreneurs cubains, victimes du renforcement de l'embargo américain sous Donald Trump. "Le secteur privé allait déjà mal, surtout à La Havane, quand les bateaux de croisière américains ont arrêté de venir", interdits d'escale dès juin 2019, note M. Pérez. Ces dernières années, les touristes américains étaient devenus les deuxièmes visiteurs de l'île - derrière les Canadiens - après le rapprochement initié fin 2014 entre les deux pays. Conséquence: en 2019, le nombre de touristes a baissé de 9,3%, à 4,28 millions.

En janvier-février 2020, le recul s'est accentué de 16,5% sur un an, avec une chute de 65% des visiteurs américains. Deuxième source de devises du pays, le secteur rapportait 3,3 milliards de dollars en 2018. Avant même le coronavirus, "(le volume de clients dans) les restaurants et les ventes n'étaient pas les mêmes qu'il y a deux ans. Et maintenant, le Covid-19 finit de les achever", soupire Omar Everleny Pérez. L'impact est brutal pour les employés, privés de revenus bien supérieurs au salaire moyen dans le public (50 dollars par mois).

"Sorry, we're closed" (Désolé, on est fermé), dit le vieux panneau métallique accroché à l'entrée de El Café, cafétéria prisée des touristes dans la vieille Havane, quartier le plus visité et désormais désert. Loliet Gonzalez, étudiante en psychologie de 25 ans, y travaille comme serveuse depuis deux ans: "Ce que je gagne me permet d'avoir le niveau de vie que je veux", explique-t-elle. Son patron lui a versé deux semaines de salaire pour tenir pendant cette crise.

"Pour l'instant ça va, mais à un moment j'aurai besoin de piocher dans mes économies". Masque en tissu sur le visage, Nelson Rodriguez, propriétaire de l'établissement, pense déjà à un avenir où Cuba tardera à voir revenir les visiteurs étrangers. "S'il n'y a pas de touristes, nous allons nous recentrer sur le public cubain, donc peut-être on devra adapter notre commerce", avec des prix plus accessibles à la population locale, dit-il.

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Vos réactions

Portrait de Kakadu
18/avril/2020 - 13h34

Il ne va pas y avoir que Cuba. Mais parlons des autres avant de parler de la crise qui nous attend à la sortie, que ce soit en France ou en Europe. Ca va pas être la joie, et ce pendant plusieurs années.