21/11/2013 18:31

L'Etat va récupérer 313 manuscrits du général de Gaulle

L'Etat va récupérer 313 documents manuscrits rédigés par le général de Gaulle entre décembre 1940 et décembre 1942, a tranché mercredi le tribunal de grande instance de Paris, considérant qu'il s'agissait d'archives publiques.

Ces brouillons de télégrammes, adressés à des cadres de la France Libre, à Churchill ou à Staline, ont été acquis par le Musée des lettres et manuscrits après avoir été conservés pendant 70 ans par la secrétaire particulière du général, Marie-Thérèse Desseignet. Ils étaient placés sous séquestre depuis plus d'un an.

Le tribunal a fait droit à la demande de l'Etat, représenté par le ministère de la Culture pour qui il s'agit d'archives publiques "imprescriptibles et inaliénables" comme l'avait plaidé son avocat Me Cédric-Aurélien Burel, et qui souhaite voir ces documents rejoindre les archives nationales.

Le musée a annoncé qu'il faisait appel, mais celui-ci n'est pas suspensif.

"Par cette décision, le tribunal affirme la légitimité historique et juridique du gouvernement de la France libre", s'est félicitée la ministre de la Culture Aurélie Filippetti. "Il rappelle aussi l'importance des archives publiques et de leur protection", poursuit dans un communiqué la ministre, qui salue une "victoire pour les chercheurs et le public, qui pourront accéder à ces documents dans les conditions prévues par la loi".

Ces messages "concernent majoritairement les ordres que le général de Gaulle donne à ses compagnons, cadres dirigeants de la France Libre, chargés de piloter les combats militaires et politiques de la liberté au Moyen-Orient, en Afrique et dans le Pacifique", selon le musée.

"Ils portent presque tous sur la période 1941-1942 et sont majoritairement destinés aux généraux de Larminat, Catroux, Koenig, Legentilhomme, Petit, Leclerc, à l’amiral Muselier, à l'amiral d'Argenlieu, à Pleven, Cassin et Palewski. Ils sont adressés de façon plus exceptionnelle à Churchill, Dejean, Tixier, Félix Eboué, et par ailleurs, quelques messages uniques sont adressés à Staline et au docteur Schweitzer", selon le musée privé parisien, qui les avait en partie exposés entre fin 2011 et avril 2012.

"La vieille France espère en la vieille Angleterre"

A l'audience du 16 octobre, l'avocat du musée, Me Arnaud Cazin d'Honincthun, avait plaidé que les documents ne pouvaient pas "être assimilés à des archives publiques car le général de Gaulle ne représentait pas une autorité d'Etat, ni le Comité français de libération nationale un gouvernement à cette période".

Mais le tribunal a estimé que ces documents avaient été rédigés par de Gaulle "dans le cadre de la fonction de représentation de la nation française qu'il s'était assignée, le temps de la guerre et donc dans le cadre d'une mission de service public".

"Cette fonction a été légitimée dès l'origine par l'adhésion de la population vivant sur les territoires non occupés, puis celle des Français entrés en résistance en métropole, ainsi que par la reconnaissance des Etats alliés", selon le tribunal.

Les instructions adressées aux généraux "ne sont pas seulement celles d'un chef de guerre, mais bien celles du chef d'une nation en guerre, menant un combat pour sa libération, mais aussi pour le respect de la souveraineté dans la perspective de l'après-guerre", selon les juges.

Pour le tribunal, les brouillons de ces télégrammes "montrent que leur auteur s'adresse aux chefs d'Etat, en chef d'Etat".

Le 30 décembre 1941, le général de Gaulle avait par exemple écrit à Churchill: "Ce que vous avez dit hier sur la France au Parlement du Canada a touché toute la nation française. Du fond de son malheur, la vieille France espère en la vieille Angleterre".

Ou encore le 6 novembre 1942, il salue le peuple et l'armée soviétiques, formant à titre personnel des voeux pour "le Grand chef de la Russie en guerre", concluant: "L'amitié franco-soviétique sortira de l'épreuve scellée par la victoire commune".

"La volonté du général de Gaulle, dans son combat pour la libération du territoire occupé, était donc bien de représenter la France, non seulement sur un terrain militaire, mais aussi sur le plan politique et diplomatique", selon le jugement.

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Vos réactions

Portrait de Nouch30
22/novembre/2013 - 18h07

N'eut-il pas été moins couteux pour l'état d'acheter ses documents quand ils ont été mis en vente, par préemption, comme il a le droit de le faire, plutôt que de régler tout ça en justice à grands frais?