10/09/2011 10:33

La fiction télé africaine veut rompre son isolement

Confrontés au manque d'argent, souvent isolés, les réalisateurs africains comptent sur le Festival de la fiction télé de La Rochelle pour présenter leurs oeuvres, mais aussi pour faire des rencontres et trouver des financements.

"Ceux qui tentent de produire des fictions en Afrique francophone ont énormément de difficultés. Ils bénéficiaient de soutiens qu'ils n'ont plus aujourd'hui. Et ils sont très isolés", explique Quentin Raspail, président du festival, dont la 13e édition s'est ouverte mercredi soir.

"L'idée c'est de leur offrir la possibilité de montrer leurs fictions à un public de professionnels, de provoquer des rencontres, peut-être de rompre leur isolement et de leur donner du courage", poursuit-il.

Trois films très différents figurent cette année dans la sélection africaine du festival: "Ina", une série du Burkina Faso en 15 épisodes de 26 minutes, qui raconte l'histoire contemporaine d'une jeune fille souvent déchirée entre l'autorité paternelle et les opportunités de la vie; "Les Rois de Ségou", une saga historique malienne sur l'épopée du royaume Bambara de Ségou; et "Julie et Roméo", un téléfilm sentimental burkinabé.

"Le festival nous permet de faire voir nos oeuvres, de rencontrer des réalisateurs et d'autres acteurs, de voir comment ils travaillent, et de discuter avec les producteurs, parce que ce qui bloque le cinéma africain, ce sont les financements", souligne Gérard Ouedraogo, acteur principal du film "Julie et Roméo".

Pour Boubacar Sidibé, réalisateur des "Rois de Ségou", première série historique africaine de cette ampleur, le festival est "une opportunité de voir la réaction des gens" vis-à-vis de son travail, jamais présenté en Europe, et de rencontrer des producteurs et diffuseurs en dehors des télévisions africaines et de la chaîne francophone TV5 Monde, qui diffuse déjà cette saga.

"On travaille à la réalisation de la deuxième saison, qui est prévue pour la fin de l'année. Comme le financement n'est pas entièrement bouclé, si on arrivait à attirer l'attention de certains producteurs, ce serait une bonne chose", indique-t-il.

Les réalisateurs d'Afrique francophone souffrent notamment d'une industrie de la fiction télé peu structurée dans leurs pays, ce qui les empêche souvent de disposer de financements pour leurs films et pour anticiper des développements futurs.

"On est encore un peu dans une production où on trouve les financements pour produire une fiction, on la produit, et après il faut pendant un an ou deux ans retourner chercher de l'argent pour de la production à court terme", explique Frédérick-Louis Boulay, directeur des programmes de TV5 Monde.

"Comme l'argent est rare, souvent le réalisateur écrit, imagine, va chercher des financements lui-même, donc joue le rôle de producteur. Ce qui manque, c'est un apport structurel en argent frais, des investissements à moyen terme qui pourraient leur donner de la visibilité pour développer, pour faire travailler des scénaristes et des réalisateurs en amont sur plusieurs projets", ajoute-t-il.

Pour lui, "l'organisation industrielle qui existe en Europe, et particulièrement en France, avec les systèmes de co-financement par le CNC (Centre national de la cinématographie), par la distribution, n'est pas assez développée en Afrique, ni même la production privée".

Grâce aux contacts noués à La Rochelle, si "dans un avenir proche, d'autres distributeurs, producteurs avaient envie de coproduire ces films, ça serait un ballon d'oxygène formidable pour permettre un décollage de cette industrie", souligne-t-il. 

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