
Un tribunal de Moscou a ordonné vendredi le placement en détention provisoire jusqu'au 5 août du Français Laurent Vinatier, accusé d'avoir violé la loi sur les "agents de l'étranger". La Cour a prononcé cette décision, à la demande des enquêteurs, bien que l'accusé ait présenté des "excuses" pour ne pas s'être enregistré comme agent de l'étranger, et avoir affirmé avoir "porté la position de la Russie" dans son travail.
Cette affaire intervient en pleine aggravation des tensions russo-françaises et russo-suisses en raison de l'offensive russe contre l'Ukraine, sujet sur lequel travaillait M. Vinatier depuis des années.
Il est accusé d'avoir illégalement recueilli des informations sur les activités militaires de la Russie mais a été officiellement poursuivi à l'heure actuelle pour avoir violé une loi traitant des "agents de l'étranger", utilisée par les autorités russes pour réprimer leurs détracteurs, un délit passible de cinq ans de prison.
Mais les termes du communiqué du Comité d'enquête, qui évoque une "collecte ciblée d'informations dans le domaine des activités militaires et militaro-techniques de la Russie", laissent présager des charges encore plus lourdes.
De telles informations, "si elles sont obtenues par des sources étrangères, pourraient être utilisées contre la sécurité de l'État" russe, a affirmé la même source jeudi, sans plus de précisions.
Selon des sources interrogées par l'AFP, l'intéressé, né en 1976, travaillait depuis de longues années sur le conflit entre la Russie et l'Ukraine, avant même l'assaut de février 2022, dans le cadre de discrets efforts diplomatiques en parallèle des États.
Les médiateurs d'ONG comme HD travaillent dans la confidentialité et hors des carcans de la diplomatie classique, ce qui permet des contacts informels entre adversaires mais cela peut aussi exposer ces acteurs à des accusations d'espionnage.
En outre, cette arrestation est intervenue au lendemain de l'interpellation d'un Russo-Ukrainien soupçonné d'avoir projeté une action violente en France, à moins de deux mois du début des Jeux olympiques à Paris.
La Russie est aussi soupçonnée de multiples actions d'ingérence, d'intimidation ou de désinformation, des accusations qu'elle rejette.
Parmi les actions pour lesquelles de tels soupçons pèsent : des cercueils installés début juin au pied de la tour Eiffel, des tags en mai sur le mémorial de la Shoah, des étoiles de David bleues marquées au pochoir à Paris et dans sa banlieue en octobre 2023.
La Russie détient plusieurs Américains dans ses prisons et est accusée de procéder à de telles arrestations pour ensuite négocier des échanges afin de libérer ses agents.
C'est le cas du journaliste américain Evan Gershkovich, accusé d'espionnage malgré ses dénégations, celles de ses proches, de son pays et de son employeur. Moscou semble vouloir l'échanger contre un homme condamné en Allemagne pour avoir commis un assassinat pour le compte des services secrets russes.
La Suisse et la Russie entretiennent aussi des relations difficiles du fait de l'Ukraine.
Le Kremlin considère que la Confédération helvétique ne respecte pas sa sacro-sainte neutralité car elle a adopté les sanctions européennes et accueille les 15-16 juin un sommet de la paix, à la demande de Kiev, tout en excluant la Russie.
Les responsables russes accusent la Suisse d'"avoir perdu toute crédibilité en tant que pays neutre et vilipendent la conférence du Bürgenstock. Faut-il voir un lien avec cette arrestation ?", s'interroge le quotidien Le Temps.
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