22/01/2021 18:02

Google durcit le ton en Australie en menaçant d'y bloquer son moteur de recherche si Canberra ne modifie pas son projet visant à contraindre le géant californien à rémunérer les médias pour leurs contenus

Google a durci le ton en Australie en menaçant vendredi d'y bloquer son moteur de recherche si Canberra ne modifie pas son projet visant à contraindre le géant californien à rémunérer les médias pour leurs contenus. Le gouvernement australien travaille sur un "code de conduite contraignant" censé gouverner les relations entre des médias en grandes difficultés financières et les géants qui dominent l'Internet, au premier rang desquels Google et Facebook, qui captent une part importante des revenus publicitaires. Ce projet, l'un des plus contraignants au monde, prévoit des pénalités de plusieurs millions d'euros en cas d'infraction et vise le "fil d'actualité" de Facebook et les recherches sur Google. Mais la directrice générale de Google Australia, Mel Silva, a avancé vendredi lors d'une audition au Sénat australien que le "scénario du pire" serait que le projet de code passe tel quel, et ajouté que son groupe se verrait le cas échéant dans l'obligation de suspendre ses services de recherche en Australie. "Si cette version du code devenait une loi, cela ne nous laisserait pas d'autre choix véritable que de suspendre Google Search en Australie", a déclaré Mme Silva. Une menace à laquelle le Premier ministre australien Scott Morrison a sèchement répondu. "C'est l'Australie qui fait les règles quant à ce qui peut être fait en Australie. C'est notre Parlement qui en décide", a-t-il déclaré. "Les gens qui sont prêts à travailler dans ce cadre en Australie sont les bienvenus. Mais nous ne plions pas devant les menaces."

L'initiative australienne est suivie de près à travers le monde à un moment où les médias souffrent dans une économie numérique où les revenus publicitaires sont de plus en plus captés par Facebook, Google et d'autres grandes firmes de la tech. La crise des médias a été aggravée par l'effondrement économique provoqué par le coronavirus. En Australie, des dizaines de journaux ont été fermés et des centaines de journalistes licenciés. Le projet de code prévoit que Google et Facebook rémunèrent les médias australiens, qu'il s'agisse du groupe public ABC ou des titres du groupe News Corp de Rupert Murdoch, pour la reprise de leurs contenus. Canberra a décidé de ne cibler que Facebook et Google, mais pas d'autres plateformes très populaires comme Instagram ou YouTube. Mme Silva a assuré que Google souhaitait soutenir les médias, et suggéré des modifications au projet de code qui doit entrer en vigueur cette année. "Il y a un chemin clair vers l'élaboration d'un code juste avec lequel on peut travailler, si on y apporte simplement de légers amendements", a-t-elle dit. Google avait récemment avancé qu'il pourrait empêcher les contenus de sites de médias australiens d'apparaître dans les réponses sur son moteur de recherche. Il a commencé à tester ce type de mesure auprès d'un petit nombre d'internautes.

Mais c'était vendredi la première fois que le groupe se disait prêt à bloquer son moteur de recherche en Autralie. Les Etats-Unis viennent aussi d'exhorter l'Australie à renoncer à son projet, le jugeant "fondamentalement déséquilibré" en faveur des médias. Facebook a également rejeté le code dans sa forme actuelle en affirmant qu'il cesserait de publier les contenus de médias australiens s'il entrait en vigueur. "La grande majorité des gens qui utilisent Facebook pourraient continuer à le faire, mais nous ne serions plus en mesure de fournir des news", a déclaré devant le Sénat australien Simon Milner, un haut responsable de Facebook. L'Australie avait initialement proposé un "code de conduite volontaire", avant de durcir sa position en affirmant qu'un accord équitable ne pouvait être trouvé entre les médias et les géants de la tech, compte tenu de leurs poids respectifs. L'Australie n'est pas le seul marché où Google est en conflit avec les médias. Jeudi, le groupe californien a annoncé la conclusion d'un accord cadre qui ouvre la voie à la rémunération des quotidiens français au titre du "droit voisin", ce nouveau droit similaire au droit d'auteur instauré par une directive européenne il y a deux ans.

Ça peut vous interesser

Ailleurs sur le web

Vos réactions