05/09/2022 15:02

Enquête sur la fusion TF1 / M6 : Qui est pour et qui est contre ? Pourquoi ni le gouvernement, ni l'ARCOM n'ont pris de positions claires sur le dossier

Annoncé en mai 2021, le projet de fusion entre TF1 et M6 divise depuis les acteurs économiques. Certains soutiennent l'union des chaînes françaises face à la concurrence américaine, d'autres s'inquiètent de l'influence d'un mastodonte de la télé.

 

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Les auteurs et France Télévisions en soutien

La patronne de France Télévisions, alliée à TF1 et M6 dans la plateforme de streaming Salto, a affiché son soutien au rapprochement de ses deux concurrents. "Nous avons besoin d'avoir des concurrents privés en bonne santé", a déclaré Delphine Ernotte lors d'une audition au Sénat.

"Parce que si demain les offres privées se délitaient - ce qui n'est pas le cas aujourd'hui -, c'est tout le média télé qui tomberait, et nous avec lui. Nous devons défendre le média télévision dans un monde où l'offre de médias ne cesse de s'élargir", a-t-elle ajouté, tout en demandant que l'opération soit accompagnée de "garde-fous" par l'Autorité de la concurrence.

Pour la SACD qui représente les auteurs, "l'émergence d'un groupe privé puissant à même de proposer une offre gratuite de qualité aux téléspectateurs et d'investir dans la création patrimoniale est une réponse nécessaire et urgente aux nouvelles concurrences numériques."

"La fusion proposée par le groupe TF1 assurerait le maintien d'un groupe audiovisuel fort et compétitif avec des centres de décision dans la création restant en France", a ajouté l'organisme dans un communiqué.

 

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Les annonceurs et Xavier Niel opposés

Pour l'Union des marques, qui représente les annonceurs, le rapprochement entre TF1 et M6 risque de limiter la concurrence sur le marché de la publicité. Lors des auditions devant l'Autorité de la concurrence en début de semaine prochaine, son directeur général Jean-Luc Chetrit entend démontrer "pourquoi le marché de la télévision est unique et non substituable, ni maintenant ni dans un futur proche", c'est-à-dire qu'il ne peut être remplacé ou étendu sans léser les annonceurs, a-t-il expliqué à l'AFP.

M. Chetrit juge également "pas suffisante" la proposition de TF1 et M6 de séparer leurs régies pendant quelques années "à l'aune de l'impact qu'aura ce nouvel acteur sur le marché de la télévision".

Du côté des opérateurs, Xavier Niel, le patron de Free (groupe Iliad), s'est fortement opposé à l'opération, contre laquelle il a lancé, en vain, plusieurs recours devant le Conseil d'Etat.

"Il y a un risque financier colossal pour Iliad, c'est une augmentation des prix" de la publicité, a-t-il déclaré devant la commission d'enquête du Sénat sur la concentration des médias en début d'année. Le dirigeant craint aussi de ne pas pouvoir lutter contre ce nouveau géant dans les négociations pour distribuer les chaînes sur les box télécoms.

"Ils vont négocier la production moins chère, vous allez faire baisser la qualité de la production", a enfin avancé M. Niel, co-fondateur du groupe Mediawan, premier producteur français audiovisuel en volume.

 

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L'Arcom et le gouvernement, pas de position claire

L'Arcom, gendarme de l'audiovisuel, doit comme l'Autorité de la concurrence se prononcer sur l'opération. Sa décision est attendue en novembre.

Son président Roch-Olivier Maistre avait déclaré en septembre 2021 que "le régulateur n'est pas là pour conserver et préserver le statu quo, mais pour anticiper et pour accompagner les transformations à l'oeuvre du paysage médiatique". Il avait également jugé "naturel" et "compréhensible" que les acteurs du paysage audiovisuel français se "mettent en ordre de marche" pour "développer leur capacité d'investissement et une sorte de souveraineté culturelle", tout en se défendant par la suite de tout a priori sur le projet.

Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, qui dispose d'un "droit d'évocation" pour contester l'avis de l'Autorité de la concurrence, a également considéré "légitime" le projet des deux chaines lors d'une audition au Sénat en mars. "Le point clé, c'est: est-ce que la publicité en ligne et la publicité sur la télévision sont un seul et même marché ? Pour le moment je ne sais pas", a-t-il affirmé.

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