02/07/2014 17:33

Même pour les matchs des Bleus, les Français sont moins scotchés à leur télévision que les téléspectateurs d'autres pays

Même pour les matchs des Bleus, les Français sont moins scotchés à leur télévision que les téléspectateurs d'autres pays, avec des parts d'audience nettement moindres, reflet d'un certain recul face à la ferveur du ballon rond.

Lundi, le match France-Nigeria a rassemblé 16 millions de téléspectateurs sur TF1, avec 70% de part d'audience, contre 28,21 millions d'Allemands devant leur téléviseur et 85,1% de part de marché pour Allemagne-Algérie.

Lors du premier match de leur équipe nationale, 82% des téléspectateurs italiens, 81,7% des Allemands ou 79,3% des téléspectateurs néerlandais ont regardé le match. La France, elle, affichait 56,3% de part d'audience pour son premier match face au Honduras et 62% pour France-Suisse comme pour France-Equateur.

"La France n'est pas un pays de forte tradition footballistique", "en France, on n'est pas assez fadas de foot", remarquent plusieurs analystes.

Les audiences pourraient pâtir de la mauvaise image de l'équipe nationale depuis quelques années, et du désamour dont souffrent les Bleus depuis la fameuse grève du bus de Knysna en 2010.

"La Coupe du Monde n'est pas qu'une manifestation de foot, mais une grande foire à l'identité nationale", explique le sociologue Albrecht Sonntag, auteur des "Identités du football européen".

"Après l'affaire des quotas (NDLR: une discrimination envisagée contre les binationaux), la polémique sur les footballeurs trop bien payés, et le Mondial de 2010, le football français sort de quatre années très négatives", souligne-t-il.

"Nous ne sommes pas portés par des résultats qui provoqueraient une assiduité plus grande", déplore également Vincent Rousselet-Blanc, auteur du blog "En Pleine Lucarne", qui suit l'actualité du sport dans les médias.

Opposant l'Hexagone à des pays sud-américains, ou à l'Italie et l'Espagne, l'expert estime que les Français réclament du score: "l'Italie n'aurait pas les mêmes résultats, les Italiens seraient quand même derrière leur équipe, c'est une religion chez eux".

"Dans les pays latins, comme les pays sud-américains ou l'Italie, prédisposés à être des fans, des adorateurs, la ferveur ne retombe jamais, c'est toujours passionnel", poursuit-il.

Pour Christian Bromberger, ethnologue, auteur de "Match de football, ethnologie d'une passion partisane à Marseille, Naples et Turin", la France, "vieux pays jacobin unifié", a manqué d'antagonismes: "il n'y a pas de derby (NDLR: de choc entre deux équipes de la même ville), contrairement à d'autres pays, et ces clivages viennent nourrir la culture du football".

Un avis partagé par Ludovic Lestrelin, auteur de "L'autre public des matchs de football": "L'identité régionale et locale est moins prononcée en France, et quand le supportérisme de club n'est pas puissant, il ne rejaillit pas au niveau national", analyse-t-il.

- "Défaut de valorisation" -

Les analystes estiment que le football souffre aussi d'un "défaut de valorisation en France" et "d'un mépris intellectuel et social, qu'il n'y a pas dans d'autres pays".

"Les classes aisées ont longtemps regardé le foot avec un certain dédain. Regardez, en 1998, les tentatives désespérées des intellectuels qui ont essayé de monter dans le train en marche...!", fait observer Albrecht Sonntag.

Le phénomène se serait "un peu estompé" depuis les années 1980 selon les spécialistes, mais le football resterait quand même "l'amusement du peuple".

Même s'il reconnaît que le public français s'est beaucoup féminisé depuis 1998, Christian Bromberger estime qu'"en France, l'intérêt pour le football est très fortement sexué ; dans d'autres pays, la participation est beaucoup plus familiale".

"Les commentateurs sportifs de TF1 feraient rire ailleurs, tant ils rappellent des trucs de base... Ils savent qu'ils ont affaire à un public qui n'a pas été à l'école du foot", s'amuse Albrecht Sonntag.

Pour le sociologue, "les Français ont une prudence terrible avant de s'enflammer: ils ont une soif terrible d'une bonne nouvelle et une trouille bleue d'être déçus à nouveau".

"Aujourd'hui on a un peu d'espoir, mais ça n'est pas le gros délire, mais souvenez-vous, en 1998, au départ, il n'y avait pas d'engouement pour l'Equipe de France non plus !", rappelle Vincent Rousselet-Blanc, s'exprimant avant la qualification de la France pour les quarts de finale, pour des retrouvailles avec l'Allemagne.

Ailleurs sur le web

Vos réactions

Portrait de Dany_Corsaire35
2/juillet/2014 - 18h00

normal, nous n'avons même pas eu les deux d'hier, et rien au programme d'ici vendredi comme s'il n'en existait pas !!!!